Un jour, un jour – L’histoire surprenante derrière l’hymne de l’été 67

En 1967, des dizaines de millions de visiteurs découvrent l’Expo à Montréal au rythme d’un refrain simple, mais accrocheur : Un jour, un jour. La chanson est omniprésente. Elle joue sur les ondes, dans les cérémonies, dans les carillons. Elle devient la bande sonore d’un moment d’optimisme collectif.

Mais derrière ce refrain se cache une histoire bien plus étonnante — une histoire de dernière minute, d’enregistrements secrets, et de tensions discrètes entre vedettes.

L’image qui déclenche tout

Dans une entrevue au Journal de Montréal en 2017, Stéphane Venne raconte que l’idée de la chanson lui est venue en voyant une image. Un matin de 1966, il feuillette La Presse et tombe sur un dessin d’architecte représentant ce que seraient les futures îles de l’Expo. L’image est grandiose, presque onirique.

« Je me suis dit : “V’là ma toune !” C’est là que nous allons être bien, que nous allons recevoir le monde. »

À l’époque, Venne a 24 ans. Il écrit des chansons depuis l’adolescence, mais n’a pas encore percé. Ce concours tombe à point. Il y a 2 200 soumissions, provenant de 35 pays. Venne arrive au bureau du Festival du disque cinq minutes avant l’heure limite pour déposer sa partition. À l’époque, on ne soumettait pas d’enregistrement : la partition était chantée en direct par un interprète engagé pour l’occasion.

Une chanson, deux parcours

Quelques jours avant l’émission spéciale de Radio-Canada où la chanson gagnante doit être révélée, Venne apprend qu’il a remporté le concours. L’information vient d’un proche impliqué dans les auditions.

Officiellement, c’est Michèle Richard qui doit dévoiler Un jour, un jour en grande première. Officieusement, Venne préfère que la chanson soit portée par Donald Lautrec, un ami avec qui il partage des affinités musicales — et qui correspond mieux à l’énergie qu’il imaginait pour l’interprétation.

Le 45 tours sort avec deux faces :
• Un jour, un jour, version francophone interprétée par Donald Lautrec
• Hey Friend, Say Friend, version anglophone adaptée par Marcel Stellman

Michèle Richard enregistre aussi sa version, conçue pour la télévision, avec une introduction et une conclusion mentionnant explicitement « Expo » et « Montréal ». Ce détail répond à une critique formulée par certains, dont le maire Jean Drapeau, qui trouvait surprenant que la chanson officielle ne mentionne ni l’événement ni la ville. Sur le site, la version instrumentale planait au-dessus des îles de l’Expo, jouée au carillon électronique par Lucien Hétu depuis la Tour Sun Life de l’île-Sainte-Hélène.

Venne enregistre sa propre version et qualifie lui-même Un jour, un jour de « terriblement efficace, un peu comme un jingle publicitaire »1. Mais cette simplicité a payé : le disque reste 32 semaines dans les palmarès, atteignant la 9ᵉ place. Il propulse Venne au rang de compositeur incontournable — auteur par la suite de Le temps est bon, Et c’est pas fini, Le début d’un temps nouveau. Quant à Lautrec, il consolide sa place comme figure phare de la musique et de la télévision québécoise.

Une dizaine de versions de Un jour, un jour ont circulé, principalement en français, interprétées par divers artistes québécois ou francophones. On recensera même une version japonaise par Nobuo Harada et ses 5 characters !

  1. Guimond, Vanessa. « La chanson qui a tout changé », Le Journal de Montréal, 22 avril 2017 []

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